Si artiste est un métier, je ne suis pas artiste ; si c’est une attitude de vie, nous sommes tous artistes.

Je peins, donc je suis

« … (wir sind) etwas von der Vielfalt Ihrer Kunst überrascht…. Irgendwie fehlt uns der grüne Faden! »

« … (nous sommes ) quelque peu surpris de la diversité de votre art … Quelque part nous manque le fil rouge (vert). »

C’est ainsi qu’une galeriste s’exprime face à ce qu’elle appelle mon art. Il faut l’entendre. Quelle est ma motivation de peindre, quelle est sa ligne, quelles sont son intention et sa visée ? Que veux-je dire, sous condition que je veuille dire quelque chose ?

Quand on est comme moi régulièrement dans des musées et des expositions d’art, on entend régulièrement des visiteurs dire devant l’un ou l’autre tableau, parfois même face à une exposition toute entière : « Cela, j’y arriverais aussi ! »

Voilà, la première raison de peindre : le faire parce qu’on y arrive. L’art est trop important pour le laisser aux seuls artistes, comme la religion par ailleurs, qu’on ne devrait pas laisser non plus aux seuls prêtres et autres pasteurs.

Ensuite : qui n’aimerait pas, à un moment ou un autre, être collectionneur d’art. Mais rares sont ceux et celles qui ont les moyens de se payer ce qui leur plaît. Alors, en peignant soi-même, ont peut collectionner au moins un artiste. Faire d’une pierre deux coups, en même temps devenir artiste et collectionneur. C’est ainsi que je décore les murs de mon chez moi.

Tout ça est banal : rendre accessible l’art à tout le monde, le banaliser, non pas pour le dénigrer ou pour s’en moquer, au contraire, pour le valoriser. C’est comme le sacerdoce universel : nous sommes tous prêtres et le temple qui est le nôtre, c’est nous-même et notre chez nous. L’art est spiritualité. Il pose la question, celle sur le sens de la vie, et il donne, en même temps, une partie de la réponse. Parce que peindre est une activité qui comporte du sens en elle-même, tout en transcendant celui ou celle qui peint ; et peut-être même celui ou celle qui regarde l’œuvre, et si ce n’est en le faisant dire à soi-même : « Ceci, j’y arriverais aussi ! »

Alors, mon art, si c’est de l’art, n’a pas d’autre sens que de se réaliser. Le sens du jeu est dans le jeu. En peignant je suis, comme en faisant du clown ou du sport ou en priant ou pensant, en soignant et accompagnant, en pleurant et en riant. Une manière de m’exprimer, de me dire, de croire et de dire. Je suis celui qui peint … et ma peinture est une invitation à peindre. On pourrait l’appeler « évangélisation », tout en disant que peindre compte plus que ce et comment tu peints.

C’est ça, le fil rouge, ou le vert, et si je surprends, en peignant, cela valait la peine.

Peindre est respirer, comme jouer et travailler, ou ce que devrait être le travail.

Si artiste est un métier, je ne suis pas artiste ; si c’est une attitude de vie, nous sommes tous artistes.

Si croire est un métier, je ne suis pas croyant, juste pasteur ; si c’est une attitude de vie, nous sommes tous invités à croire.

Où est l’artiste ? Y en a-t-il un ?

Armin Kressmann 2015

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